samedi, novembre 22, 2008

il était une fois une petite fille

Il était une fois une petite fille qui idôlatrait son papa.
Comme toutes les petites filles, somme toute, rien de bien original dans tout ça.
Il était une fois une petite fille qui grandissait sans bien s'en rendre compte.
et qui oubliait, sans doute volontairement, que tandis qu'elle grandit, son papa, lui vieillit.
Il était une fois une petite fille qui faisait des bébés et qui perdait sa rationnalité.
Car quand cette petite fille portait la vie, presque à chaque fois, son papa perdait un peu de la sienne.
C'est durant la grossesse de Martin qu'elle a appris que son papa avait hérité du cancer familial.
"allo Caro , bon il faut que je te le dise, les résultats de mes examens sont mauvais, c'est cancéreux".
Elle s'en souvient bien, la petite fille, ça a sacrément entaché cette période bénie de couvade. elle s'est follement inquiétée quand son papa a dû se faire opérer et à chaque fois qu'il devait aller se faire contrôler.
Mais les médecins sont forts et son papa est solide: le cancer a été vaincu; Martin est né et tout , ou presque a été oublié.
La petite fille a voulu faire un autre bébé. elle ne croyait pas aux malédictions , aux superstitions. Baliverne. La petie file était une cartésienne raisonnable et sensée.
Alors, la voilà portant un nouveau bébé en pleine forme dans son ventre.
Et la maman de la petite fille l'a appelée:
"Ma grande, Lundi papa doit se faire opérer: son coeur s'est détérioré de façon fulgurante; on ne peut plus attendre. On lui remplace trois valves lundi"
On va toucher au coeur de son papa.
La petite fille a du mal à le croire: son papa est un jeune homme; il est grand, il est fort. Les seules images qu'elle a de lui sont celles d'un homme escaladant des montagnes, courant encore et toujours, enchaînant les tournois de tennis, les prouesses sportives et les réussites professionnelles.
son papa ne peut pas faiblir, faillir.il est infatigable, inusable.
Et pourtant.
La petite fille cherche à comprendre; elle passe une nuit à lire, regarder, visionner, se documenter, s'informer.
Elle pourrait duper beaucoup de monde désormais et mener un colloque en cardiologie sans que quiconque se doute de la supercherie.
Car elle sait précisément comment et pourquoi les valves aortiques, mitrales et tricuspides paternelles sont détériorées.
Elle sait qu'on peut les remplacer par des valves mécaniques, inusables mais présentant un inconvénient majeur: la prise d'anti coagulants ad vitam eternam avec tous les risques que cela comporte. On peut aussi décider de lui poser des valves biologiques, d'origine humaines ou porcines qui présentent un autre inconvénient: elle s'usent et doivent être remplacées au bout de 15 ans.
Elle sait que pour pratiquer cette intervention, on doit ouvrir le sternum de son papa; on doit mettre en place une circulation extra-corporelle et, surtout, on doit, à l'aide de potassium, arrêter le coeur de son papa afin que les battements cardiaques ne gênent pas le chirurgien dans les gestes minutieux qu'il aura à opérer.
elle sait qu'ensuite, on fera redémarrer le coeur, naturellement, si tout va bien ou à l'aide de défibrilateurs.
S'il ne s'agissait pas de son papa, elle aurait l'impression d'être Abby ou Meredith et elle pourrait presque rêver que Lucas ou Derek soit à ses côtés.
Mais bon, elle a du mal auojurd'hui à rire, à s'amuser, à faire de l'autodérison.
son papa ne veut pas qu'elle débarque. elle ne le fera pas avant l'intervention; il prendrait cela comme un mauvais signe, un mauvais présage. Elle ira le voir en fin de semaine quand il sera sorti de réanimation.
Il voit du symbolique partout.
Et hier, au téléphone, il a dit à sa petite fille qu'il l'aimait. et elle en a pleuré. elle aurait préféré qu'il ne dise rien. Car il ne dit jamais rien. Elle déteste ces déclarations inhabituelles et douloureuses qui lui semblent testamentaires.
alors, elle a écrit au chirurgien qui doit opérer son papa. Geste absurde, enfantin et désespéré. Mais ça lui a fait du bien.

elle a un bébé dans le ventre mais elle est toute petite, cette fillette. Et , elle a peur , elle appréhende teriblement cette journée de Lundi.
Mais elle continue de se répéter que son papa est le plus fort, le plus insubmersible et que son coeur va endurer tout ça comme un roc. C'est obligatoire.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Sois forte petite fille...
tes amis pensent très fort à toi et à ton papa.

Anonyme a dit…

Ma Caro, que cet amour est fort, je ne suis pas une petite fille proche de son père, je le regrette tant, c'est si touchant tous ces mots. Je penserais fort très fort au cœur de ton papa demain, à toi, aux tiens. Il a beaucoup de chance ton papa d'avoir une fille comme toi, et toi un papa comme lui, encore une étape, pour un cœeur à aimer encore longtemps ***

Caro a dit…

merci à tous les deux.
Merci ma Popete , ça fait si plaisir de te lire ici, surtout aujourd'hui.
La nuit fut blanche bien sûr.
On en saura plus vers 15h.

Anonyme a dit…

des nouvelles ma Caro, j'ai pensé si fort au cœur de ton Dadyy *** Par Mail si tu veux, mais donne des news*